Le meuble noir, l’héritage d’un grand-père. Bien trop lourd, bien trop sombre, on n’y touche pas, on ne le déplace plus : il pèse des tonnes. Du bois sculpté, du chêne, du bois de fer ? ce bois dur que l’on trouve parfois dans nos églises ; un coffre ancien, des figures, de l’indéchiffrable, un coffre de marine, haut, noir, païen, la nuit tout au loin, un corsaire anglais peut-être, on ne sait pas… j’y ai posé trois lames de cristal, quelques feuilles séchées du gingko de notre jardin, un cendrier de Chine, crocodile bleu sur nénuphars bleus, une flûte andine et quelques clés, bien sûr. Un miroir aussi. Du vide, en sorte, mais du vide utile à l’œil. Dans ses flancs : lourdes assiettes siglées hôtel de la plage, verres de troquet, coupes à champagne et plats creux. Ce meuble est un mystère. Familial, paternel, immuable et pérenne. Donc rassurant.

© Tristan Jeanne-Valès - Home. 2007