24 mars 2013, dimanche dit des Rameaux, retour à Bordeaux. Dans un bar face à la gare –Le Terminus, bien sûr– j’attends Christophe F., François R. et Jean Lambert-wild. Ils arriveront en ordre dispersé, au gré des trains, plus tard. Je fais durer un thé au citron ; à deux tables de là un Johnny-cause-tout-seul célèbre sa bière de printemps, il insulte le monde en marmonnant, persuadé que le monde l’écoute, alors qu’il est seul à s'entendre. La nuit est là. Une pluie douce laisse sous les tables en terrasse des rectangles secs.
Demain je ferai le plein de photos, autour de cet Airbus A300 Zéro-G, en attendant le vol de jeudi. Le pilote porte beau son beau nom de pilote : Bordenave. Il cabrera son Airbus à quarante-sept degrés, l’Airbus n’est pas conçu pour cela mais il a confiance en son pilote, qui l’a habitué, nous aussi avons confiance en Monsieur Bordenave…
Trente et une paraboles et, pour chacune, ces vingt-deux secondes d’apesanteur, après vingt-deux secondes à 2-G : un appareil photo y pèse une tonne, on est plaqué au sol, puis, sans transition, on se met à flotter, libre et perdu. Le décompte est précis : Une minute. 30 secondes. 20. 10. 5, 4, 3, 2, unité. Cabré. Trente degrés (c’est là que tout est trop lourd) quarante, injection. Et c’est à injection que l’on flotte ; on ne pèse plus rien, la première parabole est une immense panique, un grand réflexe de vie face à l’irrationnel. Plus tard on y prendra plaisir. Vingt-deux secondes d’apesanteur, d’impesanteur, doit-on dire. Puis de nouveau plaqué au sol, surtout ne pas bouger la tête, on nous l’a dit, attendre le retour à quelques minutes normales, avant le prochain décompte.
Toutes les alarmes se déclencheront. Le mécanicien veillera à démêler les fausses des vraies, c’est un véritable casse-tête.
Construit en 1973, dans la longue généalogie des Airbus, c’est le troisième A 300 à être sorti d’usine ; heureusement l’âge des avions ne se compte pas en années, mais en heures de vol, et le nôtre en a peu, comparé à ses collègues de ligne qui triment à longueur de temps au-dessus de tous les océans du monde. Sans broncher. Ou presque.
C’est pour le jovial Bordenave, grand bavard sympathique bientôt retraité, l’un de ses derniers vols (pour l’A300 aussi, il part bientôt au rebut. Quarante ans de service).
On lui souhaitera de ne pas trop s’emmerder quand, dans son jardin, il taillera quelque rosier en évitant de voir passer quelque avion tout au loin là-haut. Ou peut-être, d’ici là, se sera-t-il crashé aux commandes d’un Bréguet 14, d’un Spitfire ou d’un Stamp; il en parle si bien, de ces avions mythiques. Non, on ne peut pas lui souhaiter cela… on ne peut souhaiter cela à aucun Bordenave au monde
Demain je ferai le plein de photos, autour de cet Airbus A300 Zéro-G, en attendant le vol de jeudi. Le pilote porte beau son beau nom de pilote : Bordenave. Il cabrera son Airbus à quarante-sept degrés, l’Airbus n’est pas conçu pour cela mais il a confiance en son pilote, qui l’a habitué, nous aussi avons confiance en Monsieur Bordenave…
Trente et une paraboles et, pour chacune, ces vingt-deux secondes d’apesanteur, après vingt-deux secondes à 2-G : un appareil photo y pèse une tonne, on est plaqué au sol, puis, sans transition, on se met à flotter, libre et perdu. Le décompte est précis : Une minute. 30 secondes. 20. 10. 5, 4, 3, 2, unité. Cabré. Trente degrés (c’est là que tout est trop lourd) quarante, injection. Et c’est à injection que l’on flotte ; on ne pèse plus rien, la première parabole est une immense panique, un grand réflexe de vie face à l’irrationnel. Plus tard on y prendra plaisir. Vingt-deux secondes d’apesanteur, d’impesanteur, doit-on dire. Puis de nouveau plaqué au sol, surtout ne pas bouger la tête, on nous l’a dit, attendre le retour à quelques minutes normales, avant le prochain décompte.
Toutes les alarmes se déclencheront. Le mécanicien veillera à démêler les fausses des vraies, c’est un véritable casse-tête.
Construit en 1973, dans la longue généalogie des Airbus, c’est le troisième A 300 à être sorti d’usine ; heureusement l’âge des avions ne se compte pas en années, mais en heures de vol, et le nôtre en a peu, comparé à ses collègues de ligne qui triment à longueur de temps au-dessus de tous les océans du monde. Sans broncher. Ou presque.
C’est pour le jovial Bordenave, grand bavard sympathique bientôt retraité, l’un de ses derniers vols (pour l’A300 aussi, il part bientôt au rebut. Quarante ans de service).
On lui souhaitera de ne pas trop s’emmerder quand, dans son jardin, il taillera quelque rosier en évitant de voir passer quelque avion tout au loin là-haut. Ou peut-être, d’ici là, se sera-t-il crashé aux commandes d’un Bréguet 14, d’un Spitfire ou d’un Stamp; il en parle si bien, de ces avions mythiques. Non, on ne peut pas lui souhaiter cela… on ne peut souhaiter cela à aucun Bordenave au monde
© Tristan Jeanne-Valès - Jean Lambert-wild, Airbus A300 Zéro-G. 2013